L’étymologie du nom de Namur s’est longtemps expliquée par l’histoire de Nam personnage issu du paganisme préromain qui aurait exercé son mauvais génie sur les gens de «Nam»ur, de «Nam»èche et de Di«nam» (Dinant), mais que Saint Materne chassa de la vallée mosane. Sa puissance dans la région avait toutefois été si longue et si agissante que, malgré le triomphe de la religion chrétienne, son nom païen de « Nam » serait demeuré dans l’appellation des trois localités que nous venons de citer. Les linguistes, philologues et toponymistes sont aujourd’hui généralement d’accord pour attribuer au nom de Namur une origine celtique. Le radical « Nam » (ou « Nem », forme sous laquelle on le retrouve dans « Nemours ») a servi dans les langues indo-européennes à désigner des vallées et des prairies. Namucum serait donc « l’endroit aux prés » ou « l’habitation dans la vallée ». Et cela correspond effectivement bien à la situation de Namur . D’autre part, les « scandinavistes » croient pouvoir risquer pour Namur une descendance de « Namée », mines, carrières, ce qui trouve aussi quelques justifications dans la nature du sol namurois.
Le territoire qui forma, au Xe siècle, le comté de Namur était peuplé, avant la conquête de César, par les Aduatiques, descendants des guerriers que les Cimbres et les Teutons, partant vers l’Italie, avaient laissé au confluent de la Sambre et de la Meuse, à la garde de leurs bagages. Cette région, qui n’était encore qu’une vaste solitude boisée, fût désignée, au VIIIe siècle, sous la dénomination de « pagus Lommensis » ou « Lomacensis ». Des localités et des monastères naquirent dans les endroits que, petit à petit, l’on défricha. Le « pagus Lomacensis » semble avoir été administré, sous les carolingiens, par des comtes ou margraves que le souverain changeait à volonté et dont la charge devint ensuite héréditaire.
Le premier comte de Namur connu paraît avoir été un certain Béranger à qui, vers l’an 960, aurait succédé Albert « descendu d’icelluy mais en quel degré ne puis dire » et dont la postérité régna jusqu’en 1195 . Henri l’Aveugle – qui avait hérité précédemment des comtés de La Roche, de Durbuy et de Luxembourg – était devenu comte de Namur en 1139. Parvenu à un âge avancé, il désigna d’abord comme héritier son neveu, Baudouin V, comte de Flandre et de Hainaut, puis il se remaria avec Agnès de Nassau. Contre toute attente, une fille Ermesinde, naquit de cette union tardive. Henri l’Aveugle déshérita alors son neveu qui, mécontent, envahit le comté de Namur et en obtint l’investiture, en 1188, de l’empereur Frédéric Barberousse qui l’érigea pour lui en marquisat . Baudouin V, en mourant, disposa du marquisat de Namur en faveur de son second fils, Philippe le Noble, à charge de le relever du Hainaut. Philippe le Noble mourut sans postérité et fit cession de son marquisat à sa sœur Yolande et au mari de celle-ci, Pierre de Courtenay.
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Pierre II de Courtenay |
Yolande et Pierre signalèrent leur avènement par l’affranchissement, en 1213, de Bouvignes et, en 1214, du quartier namurois de Neuveville. Pierre de Courtenay devint, en 1216, empereur de Constantinople. Il périt dans une embuscade en 1219 et, quelques années plus tard, sa fille aînée Marguerite, femme d’Henri, comte de Vianden, prit possession du comté de Namur sur lequel Ferrand, mari de Jeanne de Constantinople, comtesse de Flandre et de Hainaut, avait des prétentions. En 1229, Henri, roi des Romains, investit Ferrand du comté de Namur. Le différend se termina par un compromis aux termes duquel le comte de Namur s’engagea à prêter hommage au comte de Flandre et Baudouin de Courtenay, qui était devenu comte de Namur en 1237, vendit son comté, en 1262, à Gui de Dampierre.
Les comtes de la maison de Flandre se succédèrent : le fils de Gui de Dampierre, Jean Ier, commanda les six cents Namurois qui combattirent dans les rangs flamands à la bataille des Eperons d’or ; ses héritiers furent successivement Jean II, Gui II, Philippe III, Guillaume Ier et finalement Guillaume II qui mourut sans enfant et laissa le comté de Namur à son frère Jean, seigneur de Wierendale. Ce dernier, qui régné sous le nom de Jean III, connut de graves démêlées avec la Principauté de Liège et il revendit son comté de Namur à Philippe le Bon en 1421. Avec lui finit la dynastie de la maison de Dampierre et aussi l’histoire particulière du Namurois qui suivit dés lors le même déroulement historique que le reste de la Belgique.
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Gui de Dampierre, arborant les couleurs des comtes de Flandre |
Pendant la première partie du Moyen-âge, l’autorité comtale s’exerça sous la forme féodale. Le comte de Namur possédait de nombreux châteaux – notamment ceux de Montaigle, Golzinnes, Viesville, Haibe, Poilvache et Beaufort – dont les châtelains constituaient ce que l’on pourrait appeler le personnel administratif du comté, mais dont les membres n’étaient attachés au souverain que par le lien fragile de la vassalité héréditaire. L’apparition des villes et l’émancipation des classes rurales créèrent un nouveau système d’administration qui favorisa singulièrement la puissance comtale puisque le comte retint dans ses mains la juridiction et le gouvernement des bourgeois et des vilains libres. L’institution des baillis déposséda les châtelains de leur autorité qui fut ainsi centralisée entre les mains du comte.
Au XIVe siècle, le comté de Namur fut divisé en six baillages (Wasseiges, Samson, Bouvignes, Montaigle, Fleurus, Viesville), deux mairies (Namur et Feix) et la prévôté de Poilvache. Les titulaires des ces districts étaient appelés les grand officiers du comté de Namur. Subordonnés au souverain Bailli de la Province, ils comprenaient dans leur ressort tout le territoire namurois, même celui des seigneuries hautaines qui y étaient enclavées ou annexées.
Bernard Coomans de Brachène
Membre de Pro Belgica
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