mercredi 25 mai 2011

Hommage à Raoul Brabant

Photo : Christiane Brabant

Né à Houdeng-Aimeries en 1902, papa était menuisier. Il a connu maman en 1922 et ils se sont mariés en 1925. Ils ont fait bâtir leur maison en 1933 et il a réalisé une grande partie de la menuiserie de la maison. Un voisin travaillait dans un petit atelier de métallurgie chez Fernand Julien, rue de la Fonderie à La Louvière. Lorsqu'il avait besoin, il demandait à mon papa un peu d'aide. Comme la production de châssis prenait de l'extension (c'était la seule qui commençait en Belgique), Fernand Julien leur a demandé un jour d'unir leurs efforts et de s'associer tous les trois : Fernand Julien (le patron), Raoul Brabant (le second) et René Ledant (le troisième qui deviendra plus tard le mari de la fille du patron). Cette dernière Annie joua le rôle de secrétaire et de comptable. Les commandes se sont accumulées, si bien que l'on engagea un certain nombre de personnes (plus de 40 lors de la fermeture dans les années 80). Mais le destin en décida autrement pour mon papa...

Il a été rappelé le 10 mai 1940 et est tombé sous le feu ennemi le 24 mai 1940 à Gravelines. Son portefeuille lui ayant été dérobé, il a été enterré avec quatre autres soldats sous la rubrique "Soldats inconnus morts pour leur patrie". J'avais juste 17 mois et le service de la Croix-Rouge a confirmé à ma maman qu'il avait été rappelé par erreur! A partir de ce moment-là, elle les a remerciés et a cherché elle-même par d'autres associations mais sans succès... La guerre étant en pleine effervescence, on ne pouvait voyager comme on voulait. Mais ma maman était tenace et voulait le ramener au pays.

Le bourgmestre d'Houdeng-Aimeries Léon Duray a convoqué ma maman et ses deux beaux-frères. Avec ses adjoints, il leur a retracé l'itinéraire pris par ce camion le 10 mai. Puis, avec l'aide des autorités françaises et de ville en ville, on a fini par découvrir les tombes de soldats inconnus dans deux endroits différents. Avec des permis de sortie et beaucoup de papiers, le bourgmestre est allé avec eux reconnaître le corps de mon papa. Pas très facile mais avec des documents médicaux et des empreintes dentaires, ils ont pu concrétiser leurs recherches...et surtout ma photo était restée près de lui (on l'avait peut-être oubliée?). Mais il a fallu encore quatre longues années pour aboutir! Ce n'est qu'en 1947 que ma famille a pu enfin faire son deuil...

Christiane Brabant
Membre de Pro Belgica Hainaut

Photo : Christiane Brabant
Photo : Christiane Brabant

6 commentaires:

  1. C'est bien touchant cette histoire.
    Mais il en eut des centaines de milliers de la sorte tant en Belgique qu'en France,qu'en Angleterre ou dans d'autres lieux, pourquoi pas aussi en Allemagne d'ailleurs.
    Je ne vois pas pourquoi l'histoire d'un soldat devrait faire changer le cours de l'histoire des peuples.

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  2. Youri,
    Bien sûr qu'il y eu bien d'autres victimes, civiles ou militaires, et bien sûr que les victimes sont autant à déplorer dans un camp comme dans l'autre.
    Par ce témoignage, ce n'est pas seulement une vie sacrifiée qui est mise en exergue, mais c'est par ce biais également une pensée pour toutes les autres victimes que vous évoquiez, et également pour toutes les personnes survivantes à jamais marquées par cette difficile période.
    Mon avis est que c'est par nos erreurs, un certain recul, que nous sommes capables de mieux avancer. Cet acte de mémoire - dans le prolongement des commémorations du 8 mai - permet donc de "ne pas oublier".

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  3. Il ne faut certainement pas oublier et surtout pas amnistier. En revanche, on peut pardonner.

    Par mon message précédent, je voulais seulement dénoncer le fait que trop souvent, on fait appel à la mémoire des victimes des guerres pour dénoncer le fait que le pays se disloque et s'en indigner également.
    Cet amalgame des choses et des événements n'a pas lieu d'exister.

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  4. Je viens par le Journal d’un petit Belge Christiane.
    Très bel hommage ! Comme la vie peut-être cruelle !
    Le commentaire de Youri est indigne, mais il ne m’étonne pas de lui !
    A bientôt, je t’embrasse bien fort Christiane.
    Florence

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  5. Et Florence ferait bien de réfléchir avant d'écrire ..... mais ça ne m'étonne pas d'elle.

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  6. Je me suis longtemps regardé dans le miroir, je me suis relu et ne vois rien de rédhibitoire dans mes textes.
    Je rappelle que papa n'avait pas 16 ans lorsqu'il est parti en évacuation (comme des dizaines de milliers d'autres belges d'ailleurs).
    Je pourrais dire aussi que son père avait fait l'Yser où il avait été gazé. invalide à plus de 80%, il est mort des suites de "sa" Grande Guerre.

    Je reste HORRIPILE par ces déclarations qui consistent à prétendre qu'à cause (grâce) au sacrifice de nos aînés, le pays ne peut disparaître. cela n'a rien a voir. Ces déclarations sont purement EMOTIONNELLES et ne font pas avancer le débat.

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