Dès le premier chapitre, le journaliste Charles Bricman explique : "La Belgique est une éponge. Elle absorbe les fluides qui viennent de partout à l'entour et les restitue imprégnés de saveurs et de fragrances nouvelles, parfois détonantes. Ou insipides. Mais forcément métisses. Nous sommes ce qu'on appelle ici des zinnekes pour désigner ces chiens des rues à l'ascendance improbable. Nous avons bien du mal à dire ce que nous sommes et plus encore à l'expliquer à nos voisins. Sauf à leur indiquer que nous ne sommes pas hollandais, ni allemands, ni luxembourgeois, ni français, mais quand même un peu de tout çà et d'autres choses encore, à des degrés très variables selon les individus. Un concentré d'Europe mijoté à l'étuvée".
Destiné au grand public, cet essai nous explique la révolution de 1830, les problèmes communautaires, les différences économiques, la fédéralisation du pays, l'arrondissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde, etc.
J'ai trouvé son chapitre "Pauvre Wallonie" particulièrement objectif et nuancé. Après avoir évoqué l'âge d'or de l'économie wallonne et les 500.000 Flamands qui y sont venus trouver du travail jusqu'en 1960, Charles Bricman parle de son déclin. Les responsables? Les capitaines d'industrie (qui l'ont délaissée et sacrifiée par rentabilité), les grands travaux d'infrastructure routière, portuaire et ferroviaire lancés par l'Etat belge (qui ont bien contribué à l'industrialisation de la Flandre) et les responsables politiques wallons (qui ont d'abord voulu sauver les emplois des vieilles industries au lieu de tenter de les reconvertir).
Il va à contre-courant du discours actuel : "Le gouvernement régional wallon investit dans la technologie, crée des pôles de compétitivité. C'est bien. Les décideurs politiques s'emploient à convaincre qu'ils se sont convertis à l'optimisme de la volonté, qu'ils ont enfin compris qu'on ne sauvera pas les vieilles industries, qu'on n'arrêtera pas le temps avec des aides publiques, qu'il faut changer de cap. Ils ont raison, bien sûr. Mais çà prendra encore du temps, beaucoup de temps perdu pour les générations sacrifiées".
Charles Bricman ne croit pas à la scission du pays car la Flandre n'a pas envie de perdre Bruxelles et le label "Belgique" d'une part, et de nombreux problèmes seraient difficiles à régler, comme le partage de la dette publique d'autre part ("Une séparation n'aiderait en rien à résoudre les questions pendantes mais en ajouterait au contraire de nouvelles").
Sa solution? Changer de méthode et se demander quelles compétences et quel financement on veut attribuer à l'Etat belge (et non l'inverse en négociant sur ce qu'on veut lui enlever et confier aux régions). Mon seul reproche est que cette solution concerne uniquement le monde politique, et non les citoyens belges qui ont pourtant aussi un rôle à jouer, comme l'avait très bien expliqué Gilles Vanden Burre dans son livre "Oui, une autre Belgique est possible". L'auteur n'évoque pas non plus le projet de création d'une circonscription électorale nationale.
Vincent Leroy
Président de Pro Belgica Hainaut
Très bonne analyse
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